PHENOMENA

Envoyée par son père dans une pension en Suisse, Jennifer souffre de somnambulisme. Des crises qui vont la mettre en contact avec un tueur en série qui sévit dans la région.

 

Réalisation : Dario Argento

Scénario : Dario Argento et Franco Ferrini

Photographie : Romano Albani

Musique : Goblin

Durée : 115 minutes

Production : Dario Argento

Date de sortie : 1984

Genre : Giallo suréaliste

 

Jennifer Connelly : Jennifer Corvino, Donald Pleasence : John Mc Gregor, Daria Nicolodi : Frau Brückner, Dalila Di Lazzaro : directrice de la pension, Patrick Bauchau : Inspecteur Rudolf Geiger

 

 

Film exubérant à la frontière de plusieurs genres (giallo, horreur, fantastique, conte), PHENOMENA est peut-être l'œuvre la plus délirante de DARIO ARGENTO. L’enquête policière, réduite à la portion congrue, n’est qu’un prétexte à un déferlement de scènes surréalistes prenant place dans un environnement montagnard inédit pour le réalisateur. Un univers qu'il réutilisera d'ailleurs sur son film suivant, OPERA.

La scène d’ouverture, tournée dans les Alpes suisses, utilise ces décors verdoyants avec brio. D'ordinaire rassurants, la montagne et les longs sentiers prennent un nouveau visage sous la caméra de Dario Argento, le cinéaste métamorphosant ce havre de paix en un implacable sanctuaire macabre où il vaut mieux ne pas s'égarer quand on est une jeune femme.

Une mise en bouche enivrante qui laissait augurer d’un grand film... Hélas, Phenomena n’atteint jamais la perfection de TÉNÈBRES, le précédent long-métrage du réalisateur.

Le maestro a même commis quelques erreurs étonnantes pour un perfectionniste de son acabit.

Pourquoi a-t-il autant négligé certains personnages importants comme celui de la vice-directrice de l’école ? Pourquoi a-t-il cru nécessaire de nous abreuver de dialogues scientifiques qui impriment à son film un rythme languissant ?

À quel moment a-t-il pensé que les musiques d’IRON MAIDEN et de MOTÖRHEAD (deux grands groupes, là n'est pas la question) étaient adaptées aux scènes qu’elles illustrent ?

Enfin, et c’est le plus dramatique, pourquoi la dernière partie verse-t-elle autant dans le grand guignol tendance VENDREDI 13, série que Dario Argento détestait viscéralement à l’époque ?

Autant de questions qui demeurent en suspense.

Phenomena peut néanmoins compter sur une carte maîtresse qui nous ferait presque oublier toutes ces approximations : JENNIFER CONNELLY, rayonnante dans la peau d’une jeune fille (JENNIFER CORVINO) découvrant l'incroyable pouvoir de communication avec les insectes qui sommeille en elle.

Belle et magnétique, la comédienne parcourt le long-métrage avec une grâce jamais prise en défaut, y compris quand elle est immergée dans une purée d'ossements humains. On n’a d’yeux que pour elle. Dario Argento également, dont les mouvements de caméra soulignent avec délicatesse tous les faits et gestes de sa muse.

Les scènes de somnambulisme comptent parmi les plus réussies du film. Leur fascinante beauté (les éclairages bleutés et les cadrages sont assez divins) contraste violemment avec les séquences les plus gores, dont un épilogue gratiné qui dévoile l’identité du tueur comme le veut la tradition du giallo. Une révélation sans surprise à des années-lumières du choc causé par LES FRISSONS DE L’ANGOISSE à son époque. À vrai dire, on attendait un peu plus de subtilité de la part du réalisateur, qui flirte avec le ridicule pompier dans les dernières minutes.

Fourre-tout parfois intéressant, parfois ennuyeux, Phenomena souffre de son aspect protéiforme.

À l’instar de l’entomologiste paralytique incarné par DONALD PLEASENCE (très sobre), on aurait aimé se sentir un peu plus impliqués physiquement dans l’aventure. Car il faut bien avouer que l'on feuillette ce conte onirique avec une certaine distance... un comble pour ce cinéaste qui avait presque toujours su créer un lien d'intimité avec le public. 

 

★★★☆☆

 

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