THE CARD PLAYER

À Rome, le jeu du chat et de la souris entre la police et un joueur de poker tuant ses victimes au terme de parties jouées en ligne. L'inspecteur Anna Mari enquête à l'aide d'un agent britannique d'Interpol et d'un jeune joueur surdoué.

 

 

Réalisation : Dario Argento

Scénario : Dario Argento et Franco Ferrini

Photographie : Benoît Debie

Musique : Claudio Simonetti

Durée : 103 minutes

Production : Dario Argento et Claudio Argento

Date de sortie : 2004

Genre : Giallo moderne

 

 

Stefania Rocca : Anna Mari, Liam Cunningham : John Brennan, Silvio Muccino : Remo, Claudio Santamaria : Carlo Sturni, Fiore Argento : Lucia Marini

 

DARIO ARGENTO avait rendu un bel hommage au giallo avec LE SANG DES INNOCENTS, film qui affichait un net regain d'inspiration après un FANTÔME DE L’OPÉRA assez calamiteux. Son successeur est très différent sur le fond et la forme. Plus réaliste, moins fétichiste (la figure du tueur n'est plus sacralisée), THE CARD PLAYER marque une rupture dans la filmographie du cinéaste. Après ce long-métrage, plus rien ne sera jamais comme avant. Les excès de couleurs, les mouvements de caméra reptiliens et les sons tapageurs appartiennent à un passé presque révolu. Hormis une excellente scène rendant hommage aux FRISSONS DE L'ANGOISSE, The Card Player joue à fond la carte de la sobriété.

Le bilan est mitigé. Ludiques au départ (chaque carte retournée apporte quelques belles montées d'adrénaline), les scènes de poker en ligne finissent par lasser, Argento utilisant son nouveau joujou technologique comme une béquille pour camoufler un manque d'inspiration évident. La figure emblématique du tueur en série est la première à faire les frais de cette créativité en berne. D'une rare banalité, elle ne suscite que peu d'intérêt, y compris quand arrive l'heure de la grande révélation finale, passage obligé de tout bon giallo qui se respecte. Après avoir pris connaissance du visage et des motivations du joueur de poker multirécidiviste, on se dit que n'importe quel personnage principal ou secondaire aurait pu se glisser sous ses vêtements. On est très loin du choc causé par l'épilogue des Frissons de l'angoisse ou de TÉNÈBRES.

Par chance, le réalisateur réserve un meilleur traitement à son héroïne (ANNA MARI, soit le quasi-anagramme d'ANNA MANNI, alias la jeune femme tourmentée du SYNDROME DE STENDHAL), finement incarnée par la comédienne STEFANIA ROCCA. Touchante dans la peau d'une femme flic pour qui le poker va servir de thérapie (comme d'habitude avec Argento, l'origine de tous les traumas remonte à un passé très lointain), elle constitue le seul point d'accroche et la seule source de lumière d'une production qui étale les cadavres comme de la viandasse faisandée. Froide et lugubre, la mort apparaît sous son jour le moins poétique, le moins désirable. La photo du français BENOÎT DEBIE est au diapason de l'état d'esprit général : glaciale. Un enrobage en adéquation avec la teneur du film, qui marque la fin de la distanciation jadis chère au réalisateur. 

Seules les apparitions excentriques d'un médecin légiste en décalage avec sa fonction (il s'improvise danseur en plein cœur de la morgue) apportent un brin de fantaisie à la production. Un toubib haut en couleurs qui nous ramène aux grandes heures des trois premiers gialli du transalpin, qui ne rechignait pas à intégrer des personnages iconoclastes dans son récit jadis. On ne pourra malheureusement pas dire la même chose de la prestation de LIAM CUNNINGHAM (JOHN BRENNAN, le policier britannique amoureux d'Anna Mari), aussi froid qu'un caisson réfrigéré.

Même si l'on suit sans déplaisir cette course contre la montre en phase avec son époque (le poker en ligne est en plein essor depuis la victoire de CHRIS MONEYMAKER en 2003), on regrette son manque d'audace et son américanisation à outrance. Dario Argento aurait-il fini par se lasser de son propre style ?

 

★★☆☆☆

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