SOUVIENS-TOI L'ÉTÉ DERNIER

1997. Le petit monde du slasher est en pleine ébullition, dopé par le triomphe de SCREAM, sauveur d'un genre qui n'avait pas connu pareil succès depuis l'âge d'or des sagas VENDREDI 13, HALLOWEEN et FREDDY.
Sorti quelques mois après le film de WES CRAVEN, SOUVIENS-TOI L’ÉTÉ DERNIER entend bien se faire une place au soleil et profiter des retombées financières de son copain.

On aurait cependant tort de résumer le long-métrage de JIM GILLESPIE à cet aspect commercial. Même si le scénario de KEVIN WILLIAMSON  possède moins de ramifications dramatiques que celui de Scream (film qu'il avait déjà scénarisé à l'époque), on ne peut que reconnaître son extrême efficacité dans l'art de moderniser des gimmicks usés jusqu'à la corde.

Trouvant immédiatement le bon dosage entre éléments old-school (le gabarit imposant du tueur, les meurtres à l'arme blanche, les psychoses collectives, les jump scares, les courses-poursuites nocturnes sans fin) et ingrédients un peu moins conventionnels pour le genre (l'enquête policière est un peu plus élaborée que d'ordinaire, les séquelles psychologiques imputables à l'"accident" sont analysées avec une certaine gravité), le scénariste évite l'écueil du réchauffé sans pour autant renier son amour viscéral pour le cinéma d'horreur classique.

Les multiples clins d'œil au travail des anciens (notamment au cinéma de JOHN CARPENTER, grande influence de Williamson) sont d'ailleurs là pour exprimer cette filiation spirituelle. Comme peuvent en témoigner le brouillard nimbant la scène du serment (référence solennelle à FOG) et la lente respiration du criminel au moment où il s'apprête à taillader les cheveux d'une jolie nymphe (allusion tout aussi solennelle à HALLOWEEN, LA NUIT DES MASQUES), Souviens-toi l'été dernier ne cherche à aucun moment à rompre le cordon ombilical avec une certaine tradition horrifique. Un esprit général corroboré par la réalisation de Jim Gillespie qui, si elle est vivifiée par un montage furieusement moderne, perpétue une vision classiquement esthétique du slasher à travers son cinémascope raffiné.

Les séquences de terreur sont les premières à profiter du savoir-faire du cinéaste, qui orchestre quelques percutantes confrontations meurtrières entre les jeunes adultes et l'impénétrable homme au ciré. Exaltant le pouvoir oppressant du tueur au gré de plongées évocatrices (le premier homicide dans l'entrepôt de poissons), de décadrages menaçants (la fin de la scène de poursuite entre BARRY et la BMW), de jeux d'ombres inquiétants (l'entrée de l'assassin au domicile des Shivers) et de gros plans suggestifs (ou comment une promesse de mort inéluctable va finir par se refléter sur les lunettes d'une jolie blonde), Jim Gillespie parvient à conférer une vraie aura de mystère à son lugubre héros, serial-killer qui n'a jamais besoin d'en faire trop pour extérioriser sa soif impérieuse de vengeance, au demeurant prétexte à plus d'une interrogation.
La séquence nocturne dans le magasin d'articles de pêche reste l'une des meilleures du genre. HELEN SHIVERS (SARAH MICHELLE GELLAR) va livrer une bataille d'anthologie face à l'homme au crochet. Finement éclairée, galvanisée par un montage agressif, jouant autant sur les silences que sur les effets sonores disruptifs,  cette séquence coup-de-poing constitue le point d'orgue du long-métrage.

Soutenu par un casting harmonieux au sein duquel la gent féminine fait quelques belles étincelles (les délicieuses JENNIFER LOVE HEWITT et Sarah Michelle Gellar campent des détectives en herbe aussi perspicaces que sexys confrontés à la perte de leurs illusions), Souviens-toi l'été dernier s'envisage comme un très bon slasher. Débarrassé de ses plus grosses incohérences (la scène des crabes est un summum de non-sens, la mobilité exceptionnelle de l'homme au crochet défie la logique) et d'une ultime confrontation maritime qui ne tient pas toutes ses promesses, le long-métrage aurait même pu prétendre à une tout autre considération. 

 ★★★★☆